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Rêveries du promeneur Solitaire - Septième Promenade.ROUSSEAU 

"Les plantes semblent avoir été semées avec profusion sur la terre comme les étoiles dans le ciel, pour inviter l'homme par l'attrait du plaisir et de la curiosité à l'étude de la nature, mais les astres sont placés loin de nous, il faut des connaissances préliminaires, des instruments, des machines, de bien longues échelles pour les atteindre et les rapprocher à notre portée. Les plantes y sont naturellement. Elles naissent sous nos pieds et dans nos mains pour ainsi dire, et si la petitesse de leurs parties essentielles les dérobe quelquefois à la simple vue, les instruments qui les y rendent sont d'un beaucoup plus facile usage que ceux de l'astronomie. La botanique est l'étude d'un oisif et paresseux solitaire : une pointe et une loupe sont tout l'appareil dont il a besoin pour les observer. Il se promène, il erre librement d'un objet à l'autre, il fait la revue de chaque fleur avec intérêt et curiosité, et sitôt qu'il commence à saisir les lois de leur structure il goûte à les observer un plaisir sans peine aussi vif que s'il lui en coûtait beaucoup. Il y a dans cette oiseuse occupation un charme qu'on ne sent que dans le plein calme des passions mais qui suffit seul alors pour rendre la vie heureuse et douce."

Les Confessions​ - LIVRE   VI - ROUSSEAU

 

"Je donnerai de ces souvenirs un seul exemple qui pourra faire juger de leur force et de leur vérité. Le premier jour que nous allâmes coucher aux Charmettes, Maman était en chaise à porteurs, et je la suivais à pied. Le chemin monte : elle était assez pesante, et craignant de trop fatiguer ses porteurs, elle voulut descendre à peu près à moitié chemin pour faire le reste à pied. En marchant elle vit quelque chose de bleu dans la haie, et me dit : Voilà de la pervenche encore en fleur. Je n'avais jamais vu de la pervenche, je ne me baissai pas pour l'examiner, et j'ai la vue trop courte pour distinguer à terre les plantes de ma hauteur. Je jetai seulement en passant un coup d'œil sur celle-là, et près de trente ans se sont passés sans que j'aie revu de la pervenche ou que j'y aie fait attention. En 1764, étant à Cressier avec mon ami M. Du Peyrou, nous montions une petite montagne au sommet de laquelle il a un joli salon qu'il appelle avec raison Belle-Vue. Je commençais alors d'herboriser un peu. En montant et regardant parmi les buissons, je pousse un cri de joie : Ah ! voilà de la pervenche ! et c'en était en effet. Du Peyrou s'aperçut du transport, mais il en ignorait la cause ; il l'apprendra, je l'espère, lorsqu'un jour il lira ceci. Le lecteur peut juger par l'impression d'un si petit objet, de celle que m'ont faite tous ceux qui se rapportent à la même époque."

Lettre écrite par Rousseau à M. de Malesherbes le 26 janvier 1762.​

"J'allais alors d'un pas plus tranquille chercher quelque lieu sauvage dans la forêt, quelque lieu désert où rien, ne montrant la main des hommes, n'annonçât la servitude et la domination, quelque asile où je pusse croire avoir pénétré le premier, et où nul tiers importun ne vînt s'interposer entre la nature et moi. C'était là qu'elle semblait déployer à mes yeux une magnificence toujours nouvelle. L'or des genêts et la pourpre des bruyères frappait mes yeux d'un luxe qui touchait mon cœur; la majesté des arbres qui me couvraient de leur ombre, la délicatesse des arbustes qui m'environnaient, l'étonnante variété des herbes et des fleurs que je foulais sous mes pieds, tenaient mon esprit dans une alternative continuelle d'observation et d'admiration : le concours de tant d'objets intéressants qui se disputaient mon attention, m'attirant sans cesse de l'un à l'autre, favorisait mon humeur rêveuse et paresseuse […]. Mon imagination ne laissait pas longtemps déserte la terre ainsi parée. Je la peuplais bientôt d'êtres selon mon cœur, et chassant bien loin l'opinion, les préjugés, toutes les passions factices, je transportais dans les asiles de la nature des hommes dignes de les habiter. "

Masanobu Fukuoka

« Pourquoi est-il impossible de connaître la nature ? Ce que l'on conçoit comme étant la nature n'est que l'idée de nature émanant de l'intelligence de chacun. Ceux qui voient la nature vraie sont des enfants. Ils voient sans penser, net et clair. Dès qu'ils connaissent ne serait-ce que le nom des plantes, un mandarinier de la famille des agrumes, un pin de la famille des pins, ils ne voient plus la nature sous sa vraie forme. »

Masanobu Fukuoka

« Le but d'une alimentation naturelle n'est pas de créer des hommes savants capables de donner d'irréfutables explications et de choisir avec adresse parmi les divers aliments, mais de créer des gens ignorant qui prennent les aliments sans faire consciemment de distinctions. Ceci ne va pas contre la voie de la nature. En réalisant le "non-intellect", sans se perdre dans les subtilités de la forme, acceptant la couleur de la non-couleur comme couleur, l'alimentation juste commence. »

 
Masanobu Fukuoka

« Je pouvais voir que tous les concepts auxquels j'avais été attaché, l'idée de la vie elle même, était des constructions vides. Mon esprit devint léger et clair. Je dansais, fou de joie. J'entendais les petits oiseaux gazouiller dans les arbres et je voyais les vagues étinceler au loin dans le soleil levant. Les feuilles dansaient, vertes et miroitantes. Je sentais que c'était vraiment le ciel sur la terre. Tout ce qui m'avait possédé, toutes les angoisses disparurent comme des rêves, des illusions, et quelque chose qu'on pourrait appeler la "vraie nature" se révéla. [...] Non, je n'ai rien d'extraordinaire, mais ce que j'ai entrevu est immensément important. » 

Le lierre et le thym-Jean-Pierre Claris de Florian

Que je te plains, petite plante !
Disoit un jour le lierre au thym :
toujours ramper, c’ est ton destin ;
ta tige chétive et tremblante
sort à peine de terre, et la mienne dans l’ air,
unie au chêne altier que chérit Jupiter,
s’ élance avec lui dans la nue.
Il est vrai, dit le thym, ta hauteur m’ est connue ;
je ne puis sur ce point disputer avec toi :
mais je me soutiens par moi-même ;
et, sans cet arbre, appui de ta foiblesse extrême,
tu ramperois plus bas que moi.
Traducteurs, éditeurs, faiseurs de commentaires,
qui nous parlez toujours de grec ou de latin
dans vos discours préliminaires,
retenez ce que dit le thym.

Les Grenades-Paul Valéry

Dures grenades entr'ouvertes
Cédant à l'excès de vos grains,
Je crois voir des fronts souverains
Éclatés de leurs découvertes !

Si les soleils par vous subis,
O grenades entrebâillées,
Vous ont fait d'orgueil travaillées
Craquer les cloisons de rubis,

Et que si l'or sec de l'écorce
A la demande d'une force
Crève en gemmes rouges de jus,

Cette lumineuse rupture
Fait rêver une âme que j'eus
De sa secrète architecture.

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